« Un enfant de 9 ans meurt dans les bras de son père… » l’arme non déchargée avait été posée contre le piquet de parc et le coup est parti au moment où l’homme a reprit son fusil. Quel traumatisme causé par cet accident qui n’aurait jamais dû arriver. En analysant ce qui se passe régulièrement autour de nous lors de nos parties de chasse, j’ai jugé bon de traiter de ce sujet.
Depuis quelques années déjà il y a une forte sensibilisation pour le port de dispositifs fluo et le respect de la règle des 30°. Non ce n’est pas la température maxi que votre femme doit respecter pour le lavage de vos vêtements de chasse à la machine, mais l’angle de tir à respecter pour une meilleure sécurité. Je ne vous remontre par le petit dessin que tout le monde connait maintenant par coeur, mais combien d’entre nous savent le matérialiser et combien le respectent quand arrive le gibier? Surtout si c’est un « cochon » car dans bien des cas, « sus scofra » est l’animal qui rend fou.
Pour pouvoir prévenir des accidents, il faut en analyser les causes. Nous n’allons pas décortiquer chaque accident dans cet article, mais regardons tout de même quelques chiffres. En 15 ans d’observations, nous pouvons voir qu’effectivement le nombre des accidents baisse, mais pas de manière aussi significative qu’on pourrait le penser et comme dans toute activité, le risque zéro n’existe pas. Néanmoins c’est vers ce chiffre qu’il faut se rapprocher.
Nous voyons bien dans ce graphique que si le nombre des accidents est en baisse, il n’y a néanmoins rien de spectaculaire. Nous sommes même arrivés à une situation ou il devient très difficile de baisser encore et où la menace de remonter est bien présente.
Voyons maintenant dans quelles disciplines surviennent ces accidents. Nous pouvons observer que 53% sont imputés à la chasse du grand gibier et 47% à celle du petit gibier. Pour ce mode de chasse, le tir de la plume est plus accidentogène ce qui se comprend par la hauteur des tirs, cependant une grande partie est due à l’arme non déchargée lors du passage des obstacles . Pour tout passage de clôtures, l’arme doit être ouverte et les munitions enlevées. C’est impératif et seul le fusil « cassé » ou même simplement le cran de sureté mis ne sont suffisants : les cartouches, c’est dans la poche et c’est du non négociable.
Pour ce qui est du Grand Gibier, il est bon de voir au cours de quelle pratique exactement, cela pose problème. Le graphique ci-dessous nous montre qu’en majorité, il s’agit de battues au sangliers.
Alors que les prélèvements des différentes espèces ne montrent pas les mêmes proportions.
Si les prélèvements de cerfs montrent une proportion équivalente, ceux des chevreuils et sangliers sont tout à fait disproportionné en défaveur des sangliers pour qui moins de 50% des prélèvements occasionnent 70% des accidents. Il est bien là le problème car le mythe du sanglier diminue considérablement le discernement d’une part non négligeable de chasseurs.
Pourtant il y l’angle des 30° et le port du dispositif fluo!!!
Au risque de me répéter, combien d’entre nous savent vraiment le matérialiser et le respecter quand le gibier saute la ligne? Je me souviens de ce jour ou postés au bord des maïs, nous entendions les sangliers s’approcher et où j’ai vu mon voisin prêt à tirer, le canon dirigé juste en face de moi. Que se serait-il passé si un sanglier était sorti entre nous? Et même dans le respect de cet angle au delà duquel rien ne peut arriver et en l’absence de fluo : alors c’est bon? Je peux tirer? NON! la prudence reste de rigueur. Qui n’a pas vu en ces débuts de saison des chercheurs de champignons, silencieux, en tenue militaire ayant pénétré dans la forêt malgré les panneaux signalant la chasse en cours parce qu’ils n’en n’ont rien à foutre de ces cons de chasseurs ou respectueux de notre activité mais qui n’ont pas vu ces panneaux parce qu’ils ont progressé par l’intérieur du bois? N’oubliez pas que lorsque vous chassez une enceinte et que vous respectez l’angle de sécurité toutes les balles partent vers l’extérieur. Il est de plus parfois difficile de définir l’angle des 30°, nous ne sommes pas toujours postés en ligne droite avec un espace dégagé vers l’arrière. Les contours très découpés des territoires rendent souvent difficiles de déterminer ces angles.
Et-il logique d’interdire aux posté de tirer à l’intérieur des 30° et de voir les traqueurs armés dans l’enceinte avec souvent, les fusils chargés à la bretelle?
J’ai eu l’occasion de participer plusieurs fois à des battues parfaitement organisées ou sur certains postes il était interdit de tirer au rembuché et parfaitement autorisé à tirer dans l’enceinte, mais avec encore une fois, dans un angle bien défini, jusqu’à un moment donné signalé de coups de trompes par les traqueurs et avec interdiction de tirer sur un gibier en pleine course. Résultat : un beau tableau, sans incident, et très peu d’animaux blessés. La recette? une parfaite organisation, une parfaite connaissance du terrain, les postes délicats confiés à des chasseurs surs et une interdiction absolue de quitter son poste.
Je viens de retrouver une introduction sur ce sujet dans la Revue Grand Gibier n°43 que je voudrais vous faire partager :
« En tout cas, je peux vous assurer, qu’au cours d’une battue sur un territoire prestigieux, en compagnie de présidents de FDC qui avaient imposé les dispositifs fluorescents, l’un d’eux n’avait pas hésité à tirer sur un sanglier qui sortait non loin de son voisin. L’impact de la balle frappant le sol fut lui aussi très proche du posté… Comme quoi le dispositif fluorescent n’est pas la solution ultime.
Je garde le souvenir de techniciens de FDC du Sud qui ont pris à bras-le-corps la problématique de la sécurité en battue. En formant les directeurs de chasse mais aussi les chasseurs aux règles de sécurité, au maniement des armes, etc.
Pas en leur imposant le port de vêtements fluo qui, dans les faits, semblent presque dédouaner le tireur de tout acte dangereux; ce dernier se disant que, tant qu’il ne voit pas de fluo, il n’y a pas de danger…
Alors, ne serait-il pas plus judicieux de mieux former au quotidien les chasseurs sur la sécurité à la chasse (…) que de les transformer en oranges cynégétiques… ? »
Antoine Berton, rédacteur en chef de la revue Grand Gibier
Je voudrais maintenant arriver sur un point important : la moitié des accidents par balles arrivent a moins de 10m!!!
Bordel! il ne l’a pas vu avec son gilet fluo dans l’angle des 30°?
Et bien il ne s’agit pas de cela, mais simplement d’erreurs de manipulation des armes. Parfois une très grande négligence, mais souvent un manque de culture et de formation sur la manipulation des armes.
Une arme ne doit être chargée qu’en arrivant au poste, doit être déchargée au signal de fin de traque, ne doit jamais être transportée dans une housse hors du véhicule et l’on doit toujours revérifier qu’elle n’est pas chargée avant de la remettre dans le véhicule, même si l’on est certain de l’avoir déjà fait. Cela aussi, c’est impératif et non négociable.
Un traqueur ne doit jamais avoir d’arme chargée à la bretelle et certaines armes à risques ne doivent jamais être dans les mains d’un traqueur.
Les angles de tir ne doivent pas aveuglement respecter l’angle des 30°, mais doivent être adaptés à chaque poste. Cela implique une parfaite connaissance du terrain : disposez d’un plan pour y faire figurer les postes, vous aurez parfois des surprises)
Ne quittez votre poste sous aucun prétexte.
Faites vous repérer par vos voisins : aujourd’hui, il existe des Vestes de Camouflage Fluo qui sont à la fois discrètes aux yeux du gibier et parfaitement visibles aux yeux des autres Chasseurs.
Il serait bien que les FDC mettent en place certaines formations obligatoires pour les organisateurs de battues et chefs de traque.
Et pour conclure, s’il est un sujet qui semble tabou à chaque fois que la sécurité à la chasse est abordée, c’est celui de l’alcool! S’il est aujourd’hui reconnu que l’alcool diminue les réflexes et l’acuité au volant, il en est bien évidemment de même lors de la manipulation d’une arme en action de chasse. Pourquoi n’y a-t-il à ce jour aucun contrôle et que le sujet n’est jamais abordé? Faut-il se priver d’une partie de sécurité pour ne pas ternir notre image en évoquant le sujet? Pour l’instant la réponse reste dans le domaine du mystère.
C’est pourtant un problème constaté qu’il faudra bien aborder un jour…