L’hiver est bien installé et la campagne s’est recouverte d’un beau manteau blanc. C’est l’opportunité de vivre des grands moments de pistage du Sanglier.
« pister un Sanglier dans la neige !? mais tu l’aura jamais… »
Il est vrai que chez nous, cela fait partie de l’impensable pour beaucoup de Chasseurs Français. Pourtant, dans d’autres contrées, au Nord du continent Américain, c’est une pratique courante à la poursuite du Chevreuil (Cerf de Virginie), Orignal ou Caribou. Et si c’était pour nous l’occasion de s’offrir une expérience de Trappeur… Et quand je dis « une » expérience, c’est bien souvent le déclenchement d’une suite d’expériences. Une sortie sans relever d’indices laisse un peu sur sa faim, mais la découverte d’une empreinte déclenche automatiquement une lueur d’espoir. La première expérience de ce genre se solde dans la majorité des cas par un échec, mais elle a révélé le Trappeur qui sommeille en chacun de nous et l’envie de recommencer dès que l’occasion se représentera nous habite désormais. Nous venons de découvrir un mode de Chasse que peu de Chasseurs pratiquent chez nous. Un tel mode de Chasse demande de la préparation, mais le succès procure une telle joie que cela en vaut largement la peine. Rien à voir avec la Battue qui, pour certains, se résume trop souvent à du simple tir d’animaux levés par les rabatteurs. Ici, point d’aide d’auxiliaires. C’est de la Chasse à l’état pur. Même en cas d’échec de tir, cela vous aura procuré des montées d’adrénaline intenses.
La Préparation
L’équipement tout d’abord. Une tenue camo-neige protégeant bien du froid tout en gardant souplesse et discrétion est bien évidemment la plus appropriée. Méfiez-vous des tenues légères, pas chères à porter par dessus votre tenue habituelle. Ces produits sont bien souvent fragiles, bruyants et viennent entraver toute liberté de mouvements, gênant le tir et conditionnant l’échec. il existe de nos jours des tenues réversibles permettant de chasser l’hiver, avec ou sans neige, telle la tenue ARTIKA de chez Hart, qui est parfaitement adaptée à ce genre d’exercice. Des gants d’une épaisseur choisie en fonction de la région ou vous chassez et de la température qui en découle. Ces gants devront permettre de tirer sans les enlever. L’ouverture permettant le passage de l’index ne se révèle pas particulièrement pratique dans ce genre d’exercice. Au niveau des pieds, le choix des chaussures revêt une importance capitale. Toute tentative d’approche est vouée à l’échec si l’on n’évolue pas avec un maximum de confort. Des chaussures « spécial grand froid » sont les plus appropriées et se révèlent également bien utiles lors des longues heure d’attente au poste pendant les Battues. Il ne reste plus qu’à se protéger la tête (oreille et visage) et vous êtes prêt pour arpenter les territoires du Grand Nord. Suivant la température extérieure et l’effort physique que vous aurez à dépenser, n’hésiter pas à ouvrir puis refermer vos vêtements afin de ne pas trop transpirer et ventiler votre corps.
L’arme
Bien peu d’importance à vrai dire et souvent, l’arme utilisée pour la Battue convient parfaitement. Sauf exception, le(s) tir(s) devrait se faire à un distance plutôt raisonnable. Une canne de Pirsch peut se révéler utile pour appliquer un tir sur un Sanglier aperçu de loin (assez rare toutefois), mais suivant le biotope rencontré, elle pourra être abandonnée en route afin de ne pas gêner dans la progression, pour être récupérée au retour. Attention de ne pas l’oublier si cette approche se conclu par le prélèvement d’un beau mâle. Une bretelle type « sac à dos » ou « biathlon » offre un confort dans le port de l’arme sans égal, les deux mains restant disponibles jusqu’au moment final de l’approche. Les bras ainsi libres, les déplacements dans la neige en sont grandement facilités.
Une barre de céréales dans la poche et une petite gourde sont parfois bien utiles. Evoluer dans la neige engendre souvent une dépense en énergie qu’il conviendra de combler en cours de progression sous peine de s’essouffler rapidement ou de voir le tir se compliquer.
La technique
Quelques photocopies de carte du territoire seront bien utiles pour déterminer une stratégie de cheminement. Suivant l’étendue du territoire, une bonne stratégie consiste à procéder par circonférences. Sur un petit territoire, un tour complet sera un bon indicateur, mais sur de plus grandes surfaces, un découpage permettra de cibler le secteur où est remisé la bête. Les mois d’hiver sont souvent propices au tir d’un grand mâle et les gros buissons en plaine sont parfois choisis par les Sangliers. Ils disposent ainsi d’un endroit de dissimulation quasi parfait tout en gardant un oeil sur une périphérie dégagée. Attention, une « rentrée » ne signifie pas pour autant que le (ou les) Sanglier est encore sur le territoire. Un tour stratégique permet soit de confirmer sa présence, soit de découvrir des empreintes de sortie et dans ce cas, de s’épargner une approche inutile. En cas de présence avérée, il faut alors progresser avec la plus grande prudence car la marche dans la neige n’est pas des plus discrètes. Crissements sous la semelle dans la neige fraîche ou craquements sur la croûte d’une neige cristallisée par le gel trahissent votre présence. C’est maintenant certain, il est là… Il est temps de tenir l’arme à la main car vous n’aurez certainement que peu de temps pour tirer. Un petit morceau de scotch au bout du canon évitera à la neige de pénétrer à l’intérieur de celui-ci sans que cela ne nuise à la précision du tir.
La démarche de HUNTING Performance étant de faire progresser par partage de savoir et d’expériences, je me permets de partager ma propre expérience, infructueuse, à ce sujet. J’ai bien dis infructueuse, mais l’on apprend toujours plus de ses échecs que de ses réussites.
C’était un dimanche de fin janvier et le froid (entre -10 et -15°) cumulé aux chutes de neige successives des derniers jours avaient découragé une bonne partie des partenaires de notre équipe. Par manque de participants, notre président décidait donc d’annuler la Battue. Avec l’accord de tous les présents, je décidais alors de chasser seul, essuyant quelques railleries… Je partis avec deux bracelets en poche, en véritable opportuniste. Première erreur. Au bout de quelques heures de progression dans une neige poudreuse dissimulant branches et ronces et après avoir procédé à quelques « circonférences », la fatigue commença à gagner mon organisme. Les copains rentrés à la maison au coin du feu devant un DVD de chasse avaient sans doute raison. Les quelques fantômes de Chevreuils que j’avais pu apercevoir sans vraiment les identifier dictaient alors mon choix : renter à la maison à mon tour. Je rejoignais ainsi le 4×4 en longeant la plaine à environ 20m à l’intérieur du bois. A quelques centaines de mètres de la fin du parcours, ma vigilance diminue quand j’perçois plusieurs Chevreuils venant de la plaine rentrer au bois, ralentir et disparaître derrière un bouquet de petits sapins. Mes yeux scrutent aussitôt le côté opposé des sapins, mais les Chevreuils de réapparaissent pas. Pas de doute ils sont juste derrière. Je ne bouge plus pendant 10mn, mais rien ne se passe. Ce laps de temps passé, il me faut prendre une décision. Je dois progresser en avant et légèrement sur la droite pour tenter de les apercevoir sans me faire remarquer. Cela ne va pas être facile. Environ 10m sont « avalés » en 20mn environ et un Chevreuil couché sous un sapin se distingue alors. Encore quelques mètres et je pourrai peut-être identifier un individu tirable. Deux d’entre eux sont restés debout et j’identifie parfaitement un Chevrillard qui se présente de trois-quarts arrière. L’angle de tir n’est pas bon, mais un arbre me permets de prendre appuis et d’attendre qu’il se présente sous un meilleur angle. A ce moment un énorme fracas se produit juste derrière moi. Je me retourne avec surprise et aperçois un gros sanglier que j’estime à plus de 100 kg disparaître dans les épines. La neige tombe des branches et ce n’est déjà plus qu’un souvenir. « Ce con, il m’a foutu la trouille… » Inutile devous préciser que les Chevreuils avaient disparu aussi vite. Ce gros Keiler était baugé au pied d’un arbre à la lisère et à même pas 15m de moi. Il a attendu que je l’ai dépassé pour quitter les lieux à la vitesse de l’éclair. L’empreinte confirmera son poids supérieur au quintal. « Quel con, je me suis fait avoir… » Mon attention fixée sur les Chevreuils m’ont détourné de ce magnifique Sanglier que j’aurais du voir. De vouloir courir plusieurs Lièvres à la fois… En voyant le bon côté des choses, ma bredouille m’aura néanmoins donné un bel enseignement. Une telle Chasse, demandant une vigilance de tous les instants ne doit porter que sur une seule espèce. Il n’y a pas de place pour la dispersion de l’esprit.Même infructueuse, cette expérience restera à jamais gravée dans ma mémoire de chasseur et ce n’est même pas un mauvais souvenir.
Si ce mode de Chasse vous tente, n’hésitez surtout pas à vous équiper en conséquence. Dès que vous aurez vécu votre première approche sur la neige et quelque en soit le dénouement, vous n’aurez qu’une envie : recommencer.