Quand on parle de calibres à hautes vitesses, un nom vient immédiatement à l’esprit, Weatherby. Ce Chasseur, bricoleur à ses heures et suite à quelques déconvenues cynégétiques, avait développé dès 1943 quelques calibres surpuissants capables de surclasser la production existante. La suite s’écrit jusqu’à aujourd’hui puisque les calibres Weatherby -et ils sont nombreux- s’inscrivent comme une référence dans le domaine de la haute vélocité.
C’est pourtant 12 ans plus tôt à Berlin que commence la véritable histoire des calibres rapides. L’armurier Ernst-August vom Hofe, convaincu qu’un projectile de petit diamètre et rapide est capable de supplanter tout ce qui a été produit jusqu’alors. Ainsi, en 1931, naît le 7x73SE.
Les dimensions de ce calibre surprennent car elles ne font références à aucune cartouche connue. Très long avec ses 73mm, l’étui présente une ceinture comme les productions du britannique Holland-Holland. Un projectile de 7mm vient coiffer cet étui rempli de poudre. Le résultat est sans appel. En ce début de vingtième siècle, vom Hofe est capable de propulser 11g à la vitesse prodigieuse de 1004 m/s (selon sa propre source). Même si ces données semblent quelque peu optimistes, les résultats obtenus n’en restent pas moins spectaculaires. Les résultats obtenus par les Chasseurs allemands sur les grands Cerfs et autres gros Keilers attestent de l’efficacité de la munition. D’autant que la performance ne se limite pas à cela. Ernst-August vom Hofe a également développé un projectile révolutionnaire. Une munition très fuselée, comme les balles modernes, avec un arrière conique, comme les modernes également. L’idée de l’armurier allemand est tout simplement d’améliorer la pénétration dans l’air en coiffant la pointe d’une feuille d’aluminium de sertir le noyau au moyen d’une gorge et de limiter l’expansion arrière au moyen d’une bague en acier. C’est la Torpedo-Stopring. Eh ben dit donc!!! Pas con le bonhomme…
S’il est vrai que les résultats en balistique de but sont impressionnants, il est également vrai que quelques déconvenues sont également à noter. Tout d’abord, la complexité de fabrication du projectile lui inflige un équilibre pas toujours impeccable. Il arrive parfois que des balles frappent la cible a plat et non pas de face. outre ces désagréments, les armes fabriquées pour chambrer ce calibre se trouvent affublées de canons excessivement long (70cm), nécessaires à une parfaite combustion de la quantité de poudre. Il faut également fabriquer des culasses spéciales, capables d’accepter les 73mm de l’étui. Devant ce demi-succès, Ernst-August vom Hofe ne baisse pas les bras et envisage déjà la suite. c’est ainsi que l’année 1937 voit naître un calibre décliné pour les armes à verrou, mais également les armes basculantes, le 5.6×61 SE et donc 5.6×61 R SE.
L’armurier les destinent aux ongulés de montagne pour des tirs à longue distance. Le 5.6×61 SE est capable de propulser un projectile de 5g à 1 130 m/s et le second, un peu en retrait, ce même projectile à 1 060m/s. Pour palier aux problèmes rencontrés avec la Torpedo-Stopring, les deux 5.6×61 ont cette fois recours à un projectile demi-blindé beaucoup plus classique. Malgré cela, les problèmes rencontrés avec le 7×73 SE refont surface. Ce phénomène de retournement (que l’on appel nutation dans le langage balisticien) persiste. Il faut dire que la vitesse c’est encore accrue, surtout pour le 5.6×61 SE, le plus sensible des deux. Malgré cela, il faut quand même le bonheur d’un certain nombre de Chasseurs de gibier de montagne et quelques armuriers Allemands et Autrichiens proposent encore de nos jours quelques rares armes chambrées dans ces calibres.
Né de la race des gagnants, Ernst-August vom Hofe pense pouvoir encore faire mieux et en 1939, alors que l’Allemagne rentre dans un conflit dont elle ne sortira pas grandie, il présente le 7x75R SE.
Cette fois, il part d’un étui existant puisque dérivant du 9.3x74R et ne développe pas de version pour arme à verrou. Il ressert le collet et y serti un projectile de 7mm en 11g. Les performances sont cette fois plus raisonnables avec une vitesse à la bouche du canon de 935 m/s. Seulement 935 m/s serions-nous tentés de dire. Pourtant la vitesse est toujours un objectif pour l’armurier berlinois et il reprend l’idée de sa Torpedo-Stopring avec cette fois-ci un poids limité à 8g. Celle-ci s’octroie une performance de 1 056 m/s. Ce calibre toujours en vigueur sur de belles armes artisanales, rencontre un succès qui fait de lui, une référence en calibre de haute montagne.
Très affaiblie par la défaite, l’Allemagne doit se reconstruire et son économie peine à remonter, surtout dans le domaine des armes. Il faut attendre 1956 pour que vom Hofe s’occupe cette fois des armes à verrou délaissées lors de la sortie du 7x75R SE. Il transforme l’ancien 7×73 SE en 7×66 SE en gardant les caractéristiques principales.
Les performances sont conservées et le projectile Torpedo-Stopring de 8g vient rejoindre celle plus conventionnelle de 11 g, avec une vitesse prodigieuse de 1 109 m/s. Sont principal avantage réside dans le fait qu’il se contente d’un canon légèrement plus court et d’une culasse au côtes standard. Le succès rencontré ne sera pas celui dont pouvait rêver Ernst-August vom Hofe, même si son existence aura également compté dans l’histoire de la très novatrice carabine Mauser 66.
La guerre est passée laissant le pays dans un économie qui a du mal à dépasser ses frontières. D’autant plus que de l’autre côté de l’Atlantique, les choses ont bougé. Les Américains sont venus combattre en Europe et sur les autres continents. Ils profitent de la reconstruction mondiale et développent une économie florissante. Dans sont garage, Roy Weatherby s’est également bricolé quelques munitions à haute vélocité et en une grosse décennie, poussé par un sens du marketing bien américain, il a lancé lui aussi son 7mm. Il rencontre très vite le succès avec ses 7mm Weatherby Magnum, mais également les 270 et 300 Weatherby magnum. Désormais du mauvais côté de la frontière, Ernst-August vom Hofe ne reviendra jamais en concurrence avec l’américain. Les dès sont jetés.
Dans d’autres circonstances historiques, un autre scénario aurait peut-être pu voir le jour. Quoiqu’il en soit, à l’heure européenne, il est bon de se rappeler que l’histoire de la haute vitesse balistique s’est écrite de ce côté de l’Atlantique. Si son oeuvre laisse comme un sentiment d’inachevée, elle aura sans aucun doute ouvert la porte vers la voie des munitions à haute vélocité.